Daffodil Silver d'Isabelle Monnin
La présentation de l’éditeur :
Aujourd'hui est une journée particulière dans la vie de
Daffodil Silver. Elle a rendez-vous chez le notaire pour régler la succession
d'une famille aux destinées tragiques et glorieuses, une famille où les femmes
portent des prénoms de fleurs et les hommes des prénoms d'arbres, une famille
fantasque et vulnérable.
Un roman bouleversant, qui marche sur la mince bordure qui
sépare la vie de la mort, et parfois trébuche.
Avis :
Daffodil Silver vient d'enterrer ses parents et est maintenant
dépositaire d'une pesante histoire familiale, celle de sa tante Rosa. Un fardeau que sa mère, Lilas, a choisi de
porter toute sa vie et dont le sort réside maintenant entre les mains de
Daffodil. Va-t-elle à son tour opter
pour l'effacement et marcher dans les pas de Lilas ou, au contraire, choisir de
mettre un terme à cette religion maternelle et décider de vivre ?
Née dans une famille où il est de tradition de donner des
noms de fleurs aux petites filles et d'arbres aux petits garçons, Rosa est un
personnage lumineux, expansif. Sa vie
brève a marqué tous ceux qui l'ont côtoyée et qui la pleurent désormais. Au premier plan, sa sœur Lilas qui, face au
décès de sa cadette, ne peut envisager sa vie en son absence et décide de lui
consacrer son existence par delà la mort.
Sa première idée est un livre retraçant sa trop courte vie, d'autres
suivront...
Première touchée par les projets de sa mère et l'absence qui
en découle, Daffodil entreprend de livrer au notaire chargé de régler la
succession l'histoire de cette famille hors du commun. S'ouvrant sous forme de huis clos, au fil des
rendez-vous entre Daffodil et Pierre-Antoine, son notaire, le récit élargit
imperceptiblement son horizon tout au long de l'existence de Rosa, de sa
naissance à son décès. Daffodil a pourtant
à peine connu sa tante car la date de sa naissance et celle de la mort de Rosa
coïncident quasiment.
Au cœur de cette saga familiale un peu exclusive, Isabelle
Monnin met en scène quelques personnages remarquables. Au centre de la lumière : Rosa, la cadette
des sœurs Faure ! Dès sa naissance, elle
a occupé tout l'espace. Son arrivée a
transformé la vie de Lilas qui, dès lors, n'a plus vu, vécu que par elle. Rosa est vivante, enjouée, rayonnante. Elle déborde d'idées, trouve des solutions
aux problèmes les plus fous. Sa
complicité avec Lilas est extraordinaire : les deux filles s'inventent des
mondes, des histoires fantastiques, des voyages, ... Adultes, elles ne se quittent pas et partent
étudier ensemble. A sa suite, Lilas est un personnage troublant : celle qui a
vécu dans l'ombre de sa cadette, se réchauffant à sa lumière. Depuis toujours, elle a pensé mourir jeune
car marquée par la "chiale", habitée d'un sombre pressentiment. Dévastée, elle choisit de vouer ses jours à
l'absente, de s'assurer que morte, celle-ci reste bien vivante. Renonçant ainsi en quelque sorte aux vivants,
se coupant du monde. Daffodil dira
d'elle dans les petits poèmes qu'elle rédige, enfant : "mère agitée,
vagues à l'âme." A ses côtés, Seymour,
son mari, est le sauveteur américain, le parachutiste soucieux d'adoucir la
douleur de Lilas, de la rendre acceptable à sa fille. Il cherche à ramener son épouse vers les
vivants et protège sa petite jonquille de la tempête. Un beau personnage tout
en espoir et en fantaisie. Quant à
Daffodil, je choisis de ne rien pas en dire davantage, préférant comme
l'auteur, lui laisser la parole. Dans
les coulisses, d'autres personnages, tout aussi attachants, croisent la
destinée de notre héroïne et viennent, à leur tour, enrichir le passé de
Daffodil. A l'image de Pierre-Antoine,
ce notaire qui prend de l'épaisseur au fil du récit et amène le lecteur à
s'interroger...
Il est difficile de mettre le doigt sur le thème précis de
cet ouvrage, tant il semble vaste et permet une multitude de lectures :
l'héritage familial, le deuil, la place qu'occupent les défunts, les choix de
vie... Néanmoins, s'il est fortement
marqué par la mort, ce roman est loin d'être pesant et rébarbatif. Je dirais plutôt qu'il est empreint
d'émotions variées, qu'il procure autant de joie que de tristesse. Ainsi, en parallèle des événements qui
rythment la vie de Rosa et ensuite son accession au rang d'icône, le récit prête aussi bien à rire qu'à
pleurer. C'est, au final, la vie qui
s'impose à travers ce roman et mène la danse :
à chacun ensuite de la mener comme il l'entend.
Porté par l'écriture sensible et délicate d'Isabelle Monnin,
ce roman excelle à rendre palpable l'histoire qu'il véhicule et à éveiller chez
le lecteur des sentiments variés, au diapason des états d'âme de ses
héros. Il constitue pour moi une
excellente découverte et marque une belle entrée en matière dans cette rentrée
littéraire 2013.
Lu dans le cadre des Chroniques de la rentrée littéraire : un grand merci à Abeline et aux éditions JC Lattès !
Challenge 1 % de la rentrée littéraire : 1/6 |
Commentaires
@ Jérôme : Merci !